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Valentina Andrei: une vigneronne venue de l’Est

Olivier lovey web

«Sa vraie religion, c’est celle des vignes. Elle leur consacre son énergie, dur travail physique, mais aussi réflexion personnelle et concentration.»

© Olivier Lovey

Son actu

Son vin, sa cave de Saillon, ouverte chaque week-end de mai, dès le vendredi après-midi. «Je l’ai fait l’année dernière, et depuis juin je n’ai plus une bouteille à vendre!»

Ce qui la dope

«Le sentiment que, en tant qu’artisane qui perpétue des gestes ancestraux, j’ai la chance de restituer ce que la nature donne à ceux qui la respectent.»

Son don inattendu

«Je suis une grande productrice d’eau-de-vie! Je distille impitoyablement les cuvées que je juge insuffisantes. Même des vins élevés en barrique!»

Sur sa shamelist

«Des décisions ou des gestes inadéquats qui m’empêchent de mettre pleinement en valeur le raisin vendangé.»

Portrait

Fraîcheur. Le mot s’impose en écoutant, en observant la Valaisanne d’adoption. Fraîcheur de la jeune femme vive et spontanée qui raconte un parcours étonnant. Fraîcheur des anecdotes dont elle se sert pour faire comprendre ce qu’est son métier. Fraîcheur qu’elle veut donner à ses vins, condition première de «l’élégance et de la finesse, avec équilibre et longueur», qu’elle recherche obstinément.

Comment la gamine de Botosani, cinquième de six enfants, se retrouve-t-elle vigneronne indépendante à Fully et Espoir de l’année 2018 de Gault Millau? Son histoire dénote une volonté forte, masquée au premier abord par une certaine réserve. «Mes parents cultivent une dizaine d’hectares – maïs, céréales, tournesols, betteraves, haricots, quelques pieds de chasselas. Nous, les enfants, aidions en rentrant de l’école et pendant les vacances. A douze ans, j’ai participé à des vendanges dans un grand domaine. On commençait à trois heures du matin, pour profiter de la fraîcheur.»

Quand elle parle métier, Valentina se tutoie: «Tu accordes une immense importance à la fraîcheur – c’est aussi essentiel de la préserver que de lutter contre le gel, quand tu vas au milieu de la nuit allumer des bougies dans les vignes.» Le tokay récolté à Cotnari cette année-là la marque pour toujours: «J’ai su que j’allais travailler la vigne et faire du vin.»

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Formation à la dure

Pour se former à Bordeaux, il faut savoir le français. Bac en poche, Valentina, 20 ans, débarque en 2003 à Soubey, dans le canton du Jura. Elle s’occupe des deux enfants de connaissances de sa famille et fréquente le soir l’Université populaire de Porrentruy. Adieu Bordeaux, c’est pour le Valais qu’elle a le coup de foudre: «Une balade du dimanche à Molignon, au-dessus de Sion, les vignes, les murs en pierres sèches, la beauté du paysage! Ça a été le détonateur. En Roumanie, il y a des hectares de vignes à l’abandon, en terrain plat; ici chaque mètre est cultivé, même sur des pentes raides!» Pas effleurée par le doute, Valentina s’inscrit à l’Ecole d’agriculture de Châteauneuf, part en stage chez Jacques et Marion Granges.

Elle se souvient du barbu pas commode qui l’emmena en téléphérique dans son domaine de Beudon, au-dessus de Fully. «C’était raide, c’était physique!» Elle résiste, fidèle aux Granges pendant ses trois ans d’études, s’imprègne des pratiques biodynamiques du couple pionnier, qui la présente à Marie-Thérèse Chappaz. Son CFC de vigneron à peine obtenu, voici Valentina maître de chai chez elle, tout en préparant un CFC de caviste. On est en 2008. «C’était encore plus exigeant que chez Jacky Granges! Beaucoup de responsabilité, très vite. Marie-Thérèse m’a appris à déguster, à mémoriser, j’ai acquis son goût, compris son style, sa conception de l’assemblage.» Alors qu’elle suit les cours d’œnologie à Changins, la vigneronne passe tout son temps libre chez Marie-Thérèse Chappaz.

«Pas de temps pour un copain! Maintenant, si, depuis quelques mois.» A part ses vins, une descendance? A 35 ans, la question se pose; elle pirouette en riant: «Je me suis toujours sentie dix ans plus jeune que mon âge! Aujourd’hui je ne pourrais pas m’occuper d’un enfant comme je le voudrais.» Claire sur ses valeurs, elle garde de son enfance orthodoxe une foi solide mais pas la pratique et n’entre à l’église que pour l’énergie du lieu, propice à la méditation.

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La religion du vin

Sa vraie religion, c’est celle des vignes. Elle leur consacre son énergie, dur travail physique, mais aussi réflexion personnelle et concentration. C’est pourquoi elle a fini par quitter Marie-Thérèse Chappaz, il y a cinq ans, pour créer ses propres crus. Riche de ses seules économies, elle s’engage dans des œnothèques pour explorer le volet commercial du métier avant d’acheter trois cuves et une barrique pour élever sa première cuvée dans la cave d’un collègue. Car Nicolas Wüst lui confie les Magnificients 2013, cuvée unique créée en associant un jeune vigneron et un artiste – le sculpteur Etienne Krähenbühl pour l’étiquette – sous le parrainage du restaurateur Carlo Crisci, du Cerf, à Cossonay.

Si ces maîtres l’impressionnent, Valentina se sent pourtant à la hauteur, fière de son assortiment de dix-huit blancs et rouges. Outre la dizaine de parchets loués entre Fully et Chamoson, elle cultive les petites parcelles acquises à Martigny grâce à un crédit agricole. A prix modeste, car ses vignes sont toutes difficiles d’accès.

Elle met en avant ses gamays et chasselas, qui privilégient l’expression du terroir, et déborde de projets: avec un collègue tessinois, créer pour Magnificients un merlot ticino-valaisan à l’effigie du groupe rock Gotthard; cultiver de la mondeuse; ressusciter du completer à partir d’une vieille treille sauvée dans le Haut-Valais. Car ce cépage acide, à maturité tardive, voit ce défaut transformé en qualités par la grâce du réchauffement climatique, explique-t-elle, ravie à l’idée que son completer saura préserver… quoi? La fraîcheur! Son mot magique.

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Informations pratiques

Cave Valentina Andrei
Ouvert tous les vendredis et samedis du mois de mai uniquement, sinon sur rendez vous auprès de Valentina

Route de Vernayaz,1913 Saillon
Tél. 079 947 03 86

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