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Comment draguer après #MeToo?

Comment draguer après #MeToo?

«Je trouve particulièrement embarrassant de plaindre des hommes auxquels on demande de remettre en cause leur comportement plutôt que de plaindre les femmes qui ont subi ces comportements sans se plaindre pendant des siècles jusqu'en 2017», note Fiona Schmidt.

© Getty

FEMINA Que répondez-vous aux hommes qui pensent qu’il est devenu trop difficile de draguer aujourd'hui?
Fiona Schmidt
De relativiser un tout petit peu, et de constater que les gens n'ont pas arrêté de faire l'amour. Pour draguer c'est très simple: il suffit de considérer la personne que l'on a envie de draguer comme un être humain doté de goûts personnels et d'un libre arbitre dont il convient de s'enquérir avant de lancer le grappin, et de respecter si le grappin tombe à côté de la prise.

Beaucoup de rencontres se font désormais via les réseaux sociaux et les applications dédiées: avez-vous un conseil à donner à ceux qui espèrent rencontrer quelqu’un par ce biais?
Le même que dans n'importe quelle situation: respectez la personne que vous draguez. Dites bonjour, présentez-vous, personnalisez votre approche (note aux hommes qui envoient le même message type à 100 filles différentes: on a un cerveau, on le voit), n'insistez pas, n'insultez pas.

Considérez la drague comme un moment agréable à passer, ou pas, avec quelqu'un qui ne vous connaît pas, pas comme un sport de compétition ou un défouloir quand vous avez passé une journée de merde.

On entend souvent que draguer dans la rue est désormais devenu impossible. Êtes-vous d’accord avec cela?
Draguer dans la rue est devenu plus compliqué parce qu'en moyenne, une fille lambda est abordée dix fois par jour dans la rue par des mecs qui dans 9 cas sur 10 ne tiennent pas compte de ce qu'elle est en train de faire et l'insultent quand elle ne répond pas ou qu'elle répond «non». Forcément, ça rend méfiante. On ne peut pas manquer de respect aux femmes, et leur demander d'être cool: même les Tamagotchi réagissent quand on les traite mal.

Mon conseil à ceux qui veulent draguer dans la rue: vérifiez que la personne est disponible, c’est-à-dire pas en train de courir ou de marcher vite l'air préoccupé, ni de parler au téléphone ou à quelqu'un d'autre.

Dites bonjour, souriez, présentez-vous avant de nous demander notre prénom ou notre numéro, personnalisez votre approche, si ça ne marche pas, n'insistez pas, n'insultez pas, ne menacez pas, ne suivez pas.


Qu'en est-il du compliment: a-t-on encore le droit d'aborder une femme pour lui adresser une remarque positive?
Évidemment! Tout dépend de la remarque positive, du contexte et du ton! Rappel: en 2019, balancer «t'as un beau cul» ou «je lécherais tes seins» en public à une femme qui n'a rien demandé n'est plus considéré comme un compliment mais comme une agression



Quelle erreur ne surtout pas commettre le 14 février?
Les mêmes que tous les jours: manquer de respect à l'autre. Ne pas la traiter comme on aimerait qu'elle nous traite.

Que répondez-vous à celles et ceux qui déclarent que le mouvement #MeToo va trop loin, qu’il faut arrêter de s’en prendre aux pauvres hommes?
Je trouve particulièrement embarrassant de plaindre des hommes auxquels on demande de remettre en cause leur comportement plutôt que de plaindre les femmes qui ont subi ces comportements sans se plaindre pendant des siècles jusqu'en 2017. Je sais que ces réflexions sont encore très courantes et ça me désole: c'est quoi, «s'en prendre à ces pauvres hommes»? Leur demander d'avoir l'obligeance d'arrêter de nous agresser sexuellement? De bien vouloir cesser de considérer que le corps des femmes est à leur disposition?

Avec #MeToo, n’a-t-on pas tendance à mettre tous les hommes dans le même panier? Que faites-vous des «gentils»?
Là encore, cette question me semble surréaliste: #MeToo ne dénonce pas les hommes mais les agresseurs, il n'a jamais mis en cause les «gentils» comme vous dites. Ce ne sont pas les hommes en général qui posent problème, ni la drague, ce sont les hommes qui disposent du corps des femmes selon leurs propres règles et en toute impunité, comme si les femmes se résumaient à un corps dépourvu de libre arbitre dont on pouvait se servir comme dans un buffet à volonté.

Est-ce la fin de la virilité telle qu’on l’a connue avant #MeToo?
Je l'espère de tout mon cœur! Avant #MeToo, la virilité reposait exclusivement sur un principe de domination, donc de hiérarchie entre les genres: le masculin l'emportait sur le féminin, et sur tous les hommes jugés pas assez virils donc trop féminins donc méprisables. #MeToo a permis à de nombreux hommes de remettre en cause cette définition réactionnaire de la masculinité et d'imaginer une masculinité plus cool, plus inclusive, qui respecte les différences entre les sexes sans plus les hiérarchiser.

Comment percevez-vous l'avenir de la drague?
Si les hommes qui se plaignent qu'ils ne peuvent plus rien faire ni rien dire se rendent compte qu'en fait, ils peuvent encore dire et faire des tas de choses avec un tout petit effort d'imagination, ça devrait super bien se passer. J'en connais plein qui maîtrisent le sujet depuis un paquet d'années déjà…

Fiona Schmidt, «L’amour après #MeToo», éditions Hachette, 140 p.

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